Identifier tôt des besoins éducatifs particuliers, un enjeu d’inclusion sociale
Dissimulé sous des noms moins évocateurs, tels que « troubles » ou « besoins spécifiques », le handicap chez le jeune enfant reste difficile à aborder en structures d’accueil. D’abord parce qu’il implique d’assumer une différence, ensuite parce qu’il nécessite des prises en charge plus lourdes, parfois difficiles à mettre en place. Marlène Martin, chercheuse doctorante à l’université de Caen et directrice pédagogique de la Lab School Paris, revient sur l’importance de battre en brèche toute appréhension à ce sujet pour le bien des enfants, des familles… et des lieux d’accueil. Décryptage.
Les différents types de handicaps
Avant de commencer, arrêtons-nous sur une typologie des handicaps. Bien que les professionnelles de la petite enfance, à force d’habitude, parviennent souvent à identifier un retard de la parole ou de la marche, cette identification n’a rien de systématique. Avoir une idée claire des différents troubles dont peuvent souffrir les jeunes enfants est primordial pour les repérer au plus tôt. En voici une typologie simplifiée :
Les troubles sensoriels (pour les enfants non-voyants ou malentendants),
Les troubles moteurs (pour les enfants ayant des difficultés à marcher, à se mouvoir dans l’espace…) ou
Les troubles du neurodéveloppement (pour les enfants atteints de retard dans l’acquisition du langage, de la propreté, etc.).
Certaines pathologies, telles que la trisomie ou l’autisme ont parfois des répercussions sur plusieurs sphères et sont à l’origine de troubles de natures différentes.
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La loi d’inclusion de 2005
Ces troubles, autrefois pris en charge dans des structures dédiées à l’accueil d’enfants en situation de handicap, sont désormais accueillis dans les lieux d’accueil et d’éducation classiques. La loi du 11 février 2005, dite « Pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées », stipule en effet que les enfants aux besoins éducatifs particuliers ont les mêmes droits que les autres enfants, en termes de garde puis de cursus scolaire. Il s’agit d’un enjeu sociétal visant à rendre le handicap plus visible et mieux accepté – la première étape d’un cercle vertueux bien plus étendu.
Les professionnelles de la petite enfance face à des enjeux de taille
En effet (et c’est là que les professionnelles de la petite enfance ont un rôle prépondérant à jouer), plus les enfants porteurs de troubles du développement sont stimulés, plus leur développement est encourageant. Les accueillir en lieux d’accueil classiques, avec, si besoin, un accompagnement renforcé, est donc bénéfique à leur développement personnel.
Autre cas de figure : le handicap n’est pas détecté au moment où l’enfant est accueilli. Là aussi, l’attention des professionnelles de la petite enfance s’avère primordiale. De nombreuses études le montrent de concert : plus un handicap est identifié tôt, plus les possibilités de compensation sont importantes.
Imaginez par exemple un enfant qui ne parviendrait pas à parler à l’âge où tous ses camarades parlent. Si l’on attend en se disant qu’il parlera un jour, on ne lui donne pas les outils nécessaires à sa progression. Il peut s’avérer que cet enfant n’entend pas et qu’une amélioration de son audition améliorera le développement de son langage. Les solutions sont parfois toutes simples, s’il s’agit de consulter un ORL pour traiter une otite séreuse, parfois plus complexes… mais toutes donnent à l’enfant de meilleures chances de s’épanouir et de développer son plein potentiel.
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En parler pour faire équipe avec les parents
En clair, pour les professionnelles de la petite enfance qui souhaitent s’impliquer dans l’acceptation et l’accompagnement du handicap, cela signifie deux choses :
identifier un handicap ne doit pas faire peur,
communiquer avec les parents à ce sujet afin de mieux accompagner l’enfant est primordial.
Nous l’avons dit, l’identification ne constitue pas la plus grande difficulté pour les professionnelles, qui, à force d’expérience, peuvent sentir lorsqu’un enfant s'écarte significativement de certaines normes de développement. Ce qui pose davantage problème, c’est la seconde étape, c’est-à-dire le moment où il faut expliciter ce ressenti aux parents, sans pour autant poser un diagnostic. En parler aux parents signifie qu’ils pourront à leur tour consulter les professionnels de santé pour en savoir plus sur le développement de leur enfant. D’abord, parce qu’on n’a pas envie d’inquiéter les parents, ensuite parce qu’il n’est pas facile pour les parents d’entendre que leur enfant connaît certaines difficultés, enfin parce qu’une fois identifié, un trouble demande un accompagnement plus personnalisé, parfois lourd à porter pour les lieux d’accueil.
Malgré la difficulté, tous ces obstacles doivent être surmontés à la fois pour le bien de l’enfant, qui, répétons-le, progressera bien plus vite si son handicap est détecté tôt, pour les parents (qui seront ainsi mieux accompagnés sur les plans psychologique et pratique) et pour les lieux d’accueil (qui pourront bénéficier de l’aide de professionnels de santé à même d’aider l’enfant).
Une prise en charge qui doit rassurer
Aujourd’hui, bien que difficile, cette annonce ne doit plus s’ancrer dans un contexte négatif et plombant. Les avancées de la médecine sont telles que la détection de troubles chez un enfant aboutit de plus en plus à des solutions concrètes offertes par les avancées des diagnostics. Les enfants malentendants ont de grandes chances de pouvoir entendre un jour par exemple, les maladies génétiques sont de mieux en mieux connues et accompagnées, et le recul sur le trouble autistique a donné naissance à de nouvelles approches aux résultats encourageants, pour ne citer que quelques exemples.
Cette réalité permet d’aborder le handicap de manière plus apaisée et de rassurer les parents : la détection du handicap est un premier pas vers une solution.
Et c’est en marchant vers des solutions que chacun d’entre nous, parents et professionnelles de la petite enfance, nous participerons à une société plus inclusive, où la différence sera acceptée, respectée, et finalement, valorisée.